En octobre dernier et par souci de transparence, le Conseil National avait publié une présentation de l’étude socio-économique du Cabinet Strategy& s’appuyant sur la consultation d’un nombre considérable et historique d’acteurs économiques de la Principauté. Les résultats de cette étude soulignaient la
solidité du modèle économique monégasque et les nombreuses incertitudes qu’auraient fait peser un accord d’association avec l’Union Européenne pour l’économie, l’emploi en particulier celui des Monégasques et pour l’État.

Cette étude socio-économique est aujourd’hui complétée par la publication sur le site internet de l’Assemblée de l’intégralité de l’étude juridique, dont les grandes lignes avaient été présentées en même temps. Pour l’auteur de cette étude, Me Benoît Le Bret du Cabinet Gide, « la question que poserait un tel accord est celle de la remise en cause de l’actuelle hiérarchie des normes, de la perte au moins partielle de la souveraineté juridique et surtout l’essentiel du pacte social monégasque ».

Pour Régis Bergonzi, Président de la Commission pour le suivi de la Négociation avec l’Union Européenne, en charge de la coordination de ces études « Nous avons mis en lumière les risques de casse sociale avec la fin de la priorité nationale pour les Monégasques et les risques qu’auraient encouru les acteurs
économiques de la place de Monaco ».

La publication de ces études permet d’apprécier le rôle clef du Conseil National, lors de ces négociations durant lesquelles le Gouvernement a pu s’appuyer sur l’Assemblée comme ressource institutionnelle de l’État : En prenant en compte
ses positions fermes en tant que relais des préoccupations légitimes de la population sur ce sujet et parce qu’un projet de loi d’autorisation de ratification devait, selon la Constitution, faire l’objet d’un vote des élus.

C’est dans ce cadre, avec la volonté d’être éclairé en toute objectivité sur l’intégralité des conséquences juridiques, sociales et économiques d’un éventuel accord, que les études, aujourd’hui publiées dans leur intégralité, ont été commanditées.

Le résultat de ces études illustrent sans ambiguïté le constat partagé -pour reprendre les termes du communiqué du Gouvernement du 15 septembre dernier- « d’une impossibilité de concilier les exigences de l’Union Européenne avec les lignes rouges arrêtées par le Prince ».

Dans un climat désormais plus serein après la suspension des négociations avec l’Union Européenne, la Présidente Brigitte Boccone-Pagès souligne que « cette étude d’impact (…) servira désormais de socle à toute réflexion concernant d’éventuels accords sectoriels avec notre partenaire européen ».

Les éléments clefs de l’étude juridique

L’étude juridique, qui offre un éclairage complémentaire à l’étude socioéconomique, prend en considération l’ensemble des implications d’un éventuel accord.

Une première approche permet d’envisager cette hypothèse du point de vue de l’UE en rappelant qu’une association « à la carte » serait difficilement inenvisageable car celle-ci, en créant un précédent, dégraderait l’acquis communautaire. Or la reprise de cet acquis dans le droit monégasque nécessiterait la modification
préalable de la Constitution. En effet, une fois transposé en droit monégasque, l’acquis communautaire, avec ses caractéristiques propres, de cohérence, de globalité, son caractère dynamique, notamment via la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne, aurait pour effet d’inverser la hiérarchie des normes établie par la Constitution.

Du point de vue monégasque, rappelons que l’un des principes fondateurs du droit de l’UE est la non-discrimination fondée sur la nationalité, qui est pourtant le fondement même du pacte social monégasque. Celui-ci repose en effet sur la priorité nationale dans l’accès au logement, à l’emploi, à certaines professions, complétée d’une série d’avantages propres pour les ressortissants français et les ayants droits, tissée au fil des ans.

De leur côté, les actuelles réglementations spécifiques aux professions réglementées monégasques ne sauraient survivre à un accord d’association. Il en va de même pour certains postes de l’administration. En effet, imposer la liberté de circulation, sans règle de priorité qui permettrait à tout citoyen européen de candidater à un poste public n’est pas une option envisageable à
Monaco.

En parallèle, les avantages bénéficiant aux ressortissants français (ou italiens), notamment en termes d’accès à l’emploi ou de sécurité sociale auraient encore moins de chance d’être garantis.

En conclusion, deux choses importantes sont à retenir : d’une part Monaco est déjà étroitement associé à l’UE et au droit de l’UE, tant par la jurisprudence de ses tribunaux que par une somme considérable d’accords tout d’abord avec la
France, mais aussi avec l’Union, y compris dans des domaines de souveraineté (TVA, Monnaie, Police). À tous points de vue, Monaco n’est pas une île au regard de l’UE. C’est déjà le cas aujourd’hui et ça le restera demain, avec ou sans accord.

Surtout, la Principauté s’est construite et développée autour de notre pacte social sous la conduite de nos Princes, qui est et restera durablement incompatible avec les piliers du marché intérieur que sont les cinq libertés fondamentales (libre circulation des personnes, des marchandises, des capitaux, libre prestation de service et liberté d’établissement) et le principe de non-discrimination.

Aucune des dérogations octroyées à ce jour par l’UE à des pays tiers dans ces domaines, fussent des États de petite dimension avec une forte identité nationale ne permettrait à la «priorité nationale» et à certains liens privilégiés avec la France de survivre à un tel accord.

Consulter l’étude juridique dans son intégralité 👇
https://rb.gy/x57m0s

Consulter l’étude socio-économique dans son intégralité 👇
https://rb.gy/rv3hhb